Une juge de l’immigration de Louisiane a estimé vendredi que “Mahmoud Khalil, diplômé de l’université de Columbia et résident permanent légal, pouvait être expulsé après que le gouvernement américain a fait valoir que sa présence [aux États-Unis] entraînait ‘des conséquences potentiellement graves en matière de politique étrangère’”, rapporte CNN.

La décision de la juge administrative Jamee Comans fait suite à la présentation par le gouvernement fédéral d’une note du secrétaire d’État Marco Rubio “alléguant que Khalil est expulsable en raison de ses ‘croyances, déclarations ou associations’ qui compromettraient les intérêts de la politique étrangère des États-Unis”, ajoute la chaîne américaine.

Mahmoud Khalil, âgé de 30 ans, fils de Palestiniens, né en Syrie et détenteur d’un passeport algérien, était l’une des principales figures des manifestations propalestiniennes à Columbia, jugées “antisémites” par l’administration Trump.

Il a été arrêté le 8 mars “dans la résidence universitaire où il habite avec sa femme, une citoyenne américaine enceinte” de leur premier enfant, précise NPR. “Il a été transféré au centre de détention de LaSalle, à Jena,en Louisiane, où il est détenu depuis”.

“Pouvoir extraordinaire” de Marco Rubio

M. Khalil “a été le premier militant ciblé par l’administration Trump, qui continue de réprimer les étudiants internationaux participant à de telles activités sur les campus”, souligne la très conservatrice National Review. “Plus de 800 visas étudiants ont été révoqués ces dernières semaines”, ajoute le magazine.

La décision de la juge Comans “confirme le pouvoir extraordinaire dont dispose le secrétaire d’État, Marco Rubio, pour cibler toute personne non citoyenne en vue de son expulsion”, analyse The New York Times.

La magistrate a en effet statué que la note de M. Rubio était “suffisante” et qu’elle n’avait pas le pouvoir de se prononcer sur les arguments de la défense relatifs à la liberté d’expression. “Rien n’indique que le Congrès ait envisagé qu’un juge de l’immigration ou même que le procureur général [le ministre de la Justice] puisse annuler la décision du secrétaire d’État sur des questions de politique étrangère”, a-t-elle déclaré.

NPR rappelle que pour ordonner l’expulsion de M. Khalil, Marco Rubio “s’est appuyé sur une loi fédérale rarement utilisée” datant de la guerre froide, qui confère au secrétaire d’État “le pouvoir de décider si la présence d’un non-citoyen aux États-Unis menace les objectifs de politique étrangère du pays”.

Les avocats de Khalil “poursuivront leur combat”

Pour le New York Times, le jugement conforte assurément le gouvernement “dans ses efforts pour réprimer les manifestations propalestiniennes sur les campus universitaires américains”. Mais il est “loin d’être définitif quant à l’expulsion de M. Khalil”.

Ses avocats, qui ont jusqu’au 23 avril pour faire appel, “poursuivront leur combat en Louisiane et dans le New Jersey, arguant qu’il a été pris pour cible en raison de ses propos, protégés par la Constitution”, note le quotidien américain.

“Les questions constitutionnelles au cœur de l’affaire seront probablement examinées plus en détail par un tribunal fédéral du New Jersey”, où Mahmoud Khalil a engagé parallèlement une autre procédure pour contester la légalité de sa détention.

Après le jugement, le militant s’est directement adressé à la magistrate et n’a pas mâché ses mots. “Je voudrais citer ce que vous avez dit la dernière fois, à savoir que ‘rien n’est plus important pour ce tribunal que le droit à une procédure régulière et à une équité absolue’, a-t-il déclaré, selon des propos relayés par The Guardian.

Et d’ajouter : “De toute évidence, ce dont nous avons été témoins aujourd’hui, c’est qu’aucun de ces principes n’a été appliqué, ni aujourd’hui ni sur l’ensemble de la procédure.”