(Québec) À peine arrivé, le ministre fédéral Pablo Rodriguez est déjà la cible d’attaques de ses adversaires dans la course à la direction du Parti libéral du Québec (PLQ), ainsi que de la Coalition avenir Québec (CAQ).
« Je ne suis pas en accord avec sa feuille de route au niveau de la gestion des finances publiques, au niveau de l’invasion des champs de compétence du Québec et la vision économique de ce gouvernement-là », a critiqué le député libéral et candidat Fred Beauchemin. Son expérience « reflète quand même la gestion du gouvernement du Parti libéral du Canada », a-t-il ajouté.
L’ancien président de la Fédération des chambres de commerce du Québec Charles Milliard a affirmé de son côté avoir « hâte d’entendre comment [M. Rodriguez] pourra incarner le renouveau dont le PLQ a besoin ». Dans une déclaration à La Presse, M. Milliard a ajouté : « Souhaitons aussi qu’il pourra se consacrer à temps plein à cette tâche importante, le plus grand parti politique de l’histoire du Québec le vaut bien. »

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Le candidat à la direction du PLQ Fred Beauchemin
Selon nos informations, Pablo Rodriguez démissionnera jeudi de son poste de ministre des Transports et de ses fonctions de lieutenant politique, mais il devrait toutefois rester en poste comme député fédéral d’Honoré-Mercier pour le moment.
Les adversaires de M. Rodriguez dans cette course risquent toutefois de critiquer cette décision. Déjà, certains se demandent à mots couverts si sa campagne ne sera pas indirectement financée par le Parlement canadien.
L’avocat fiscaliste originaire de Matane Marc Bélanger, qui est aussi candidat dans la course, y est également allé d’une pointe à l’endroit de M. Rodriguez : « Cette campagne lui offrira enfin l’opportunité d’être plus présent sur le terrain, de sortir de Montréal et d’aller à la rencontre des Québécois dans toutes les régions du Québec », a-t-il écrit dans une déclaration.
Denis Coderre a précisé à La Presse mercredi qu’il commenterait l’arrivée de M. Rodriguez une fois que ce dernier en aurait fait l’annonce. Une conférence de presse est prévue jeudi. En août, l’ex-maire de Montréal avait affirmé que « le timing est mauvais » pour son « chum Pablo », alors qu’il aurait dû selon lui se concentrer pleinement à aider le PLC à gagner l’élection partielle dans LaSalle–Émard–Verdun.
Fred Beauchemin a également affirmé que le saut de M. Rodriguez dans la course à la direction du PLQ est « une bonne affaire », puisque le plus grand nombre de candidats possible est souhaité « pour avoir un débat d’idées ». « On va accepter tout le monde », a ajouté le député libéral en s’adressant aux journalistes à la sortie de la période des questions, à Québec.
Le président du Conseil du patronat du Québec et ancien député libéral, Karl Blackburn, a de son côté salué l’arrivée de Pablo Rodriguez dans la course. Il s’agit, dit-il, d’une « candidature de [haut] niveau ». « D’avoir des gens de tous les horizons, c’est bon pour un parti politique. […] Le Parti libéral du Québec a toujours été un parti unique, et il n’a besoin de personne pour se faire guider. »
De passage à l’Assemblée nationale pour participer à une commission parlementaire, il a commenté son état de santé. En juin, il avait fermé la porte à l’idée de se lancer dans la course. « C’est clair que ma réflexion s’est arrêtée il y a 10 jours quand j’ai eu ce diagnostic », avait-il dit à La Presse. Mais depuis « quelques semaines, dit-il, je connais mon adversaire, je connais son grade, son stade et son poids, et je sais quels outils je dois utiliser pour le vaincre, et c’est l’opération. »
« Je vais me faire opérer d’ici quelques mois, et tout ça devrait être derrière moi à partir de ce moment. » Sa décision pourrait-elle changer, dans ces conditions ? « Ma priorité pour le moment, c’est ma santé », a-t-il répondu, sans complètement fermer la porte.
Une « succursale » des libéraux fédéraux, selon la CAQ
Du côté de la CAQ, on profite du saut de M. Rodriguez pour critiquer le PLQ. « On constate que la venue de M. Rodriguez ne fait que confirmer que le Parti libéral du Québec n’est qu’une succursale du Parti libéral de Justin Trudeau », a dénoncé le leader parlementaire caquiste Simon Jolin-Barrette à sa sortie de la séance du Conseil des ministres.
Il estime qu’il est de mauvais augure de voir que « le lieutenant politique de Justin Trudeau » se présente pour un parti au Québec alors que M. Trudeau « vient de décrier la protection de la langue française ».
M. Jolin-Barrette a affirmé que le PLQ « est infiltré par le Parti libéral du Canada » et que ce n’est pas un « parti qui défend et promeut l’identité québécoise, la langue française, le fait de valoriser l’ensemble des régions du Québec », mais un « parti centré sur certains groupes d’intérêts ».

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Simon Jolin-Barrette
Il n’y a aucun lien à faire entre le PLC et le PLQ, croit cependant la députée libérale Jennifer Maccarone. « Il n’y a pas d’historique de lien entre le Parti libéral et le Parti libéral du Canada. On est très distincts », a-t-elle affirmé. D’autres élus du caucus ont vanté l’expérience de M. Rodriguez.
« C’est un campaigner, quelqu’un qui a de l’expérience, ça, c’est certain », a affirmé Virginie Dufour.
La députée Désirée McGraw a quant à elle donné son appui à M. Rodriguez avant même qu’il se lance, en août. Il recevra aussi l’appui de Luc Fortin, ancien ministre dans le gouvernement de Philippe Couillard. M. Fortin, qui a été député de Sherbrooke, doit agir à titre de coprésident de sa campagne au leadership, selon nos informations.
Marwah Rizqy a décrit M. Rodriguez comme un candidat « de qualité », et une personne « avec beaucoup d’expérience ». À micro ouvert, les élus ne craignent pas qu’on associe le PLQ au parti de Justin Trudeau. « On est un grand parti. On a un intérêt à avoir des candidatures pour notre course à la chefferie. C’est loin d’être une bouée [pour le PLC] », a ajouté la députée libérale. Madwa-Nika Cadet estime que ce sera à M. Rodriguez d’expliquer pourquoi il souhaite rester député fédéral pendant la course, mais acceptera sa décision.
Guilbault souhaite un ministre québécois
Le gouvernement Legault a de son côté émis le souhait que le poste de ministre des Transports, laissé vacant par M. Rodriguez, soit confié à un élu québécois.
« Il y a bien des gens compétents dans toutes les provinces et territoires du Canada, mais c’est sûr que d’avoir un ministre aux Transports, qui est un poste très important, qui aurait une sensibilité québécoise, ce serait apprécié parce qu’on sait qu’on a besoin d’argent pour nos routes et nos transports collectifs et il y a un certain désengagement du fédéral », a indiqué la ministre des Transports, Geneviève Guilbault.
Avec Charles Lecavalier, Tommy Chouinard, et Joël-Denis Bellavance, La Presse