Je n’ai que 19 ans.
Je ne suis pas un expert politique. Je n’ai pas fait Sciences Po. Je n’ai pas de grandes responsabilités, ni de métier prestigieux. Je suis juste un jeune Français parmi tant d’autres, qui regarde ce qu’il se passe dans son pays avec les yeux ouverts, et le cœur de plus en plus serré. Je n’ai pas la prétention de détenir la vérité. Mais j’ai le discernement, au moins, de voir quand quelque chose cloche. Et aujourd’hui, ça cloche. Partout.
Hier, Marine Le Pen a été condamnée dans l’affaire des assistants parlementaires. Certains s’en réjouissent. D’autres crient au complot contre la démocratie. Moi, je regarde la scène avec une forme de lassitude froide. Pas parce que je suis indifférent, non. Mais parce que cette affaire est, pour moi, juste un symptôme de plus dans un système malade. Le Rassemblement National se présente en victime d’un système qu’il rêve pourtant de contrôler. Et pendant ce temps, d’autres partis s’indignent ou se moquent, alors qu’on sait très bien que si la justice s’était attaquée à l’un des leurs, ce sont les mêmes qui auraient crié à la persécution politique.
Ce double discours permanent. Cette hypocrisie institutionnalisée. Ce théâtre de la division, où chacun joue son rôle avec sérieux mais où plus personne ne semble parler pour nous. Pour tous.
Parce qu’en vérité, ce qui me fatigue, ce n’est pas seulement cette affaire. Ce qui me fatigue, c’est la polarisation permanente de notre vie politique. C’est de voir la France glisser doucement mais sûrement vers un jeu de camps, de clans, où il ne s’agit plus de gouverner un peuple, mais de dominer un adversaire. Où l’extrême droite s’installe comme si elle n’était qu’une droite parmi d’autres. Où l’extrême gauche promet de « casser le système » sans parfois même expliquer ce qu’il faudrait reconstruire derrière. Où Emmanuel Macron se drape de rationalité centriste pendant que la colère grandit, faute d’écoute, faute de courage sur des sujets essentiels.
Oui, la montée des extrêmes est dangereuse. Pas seulement pour leurs idées qui pour certaines me glacent le sang, mais parce qu’elle est le produit direct d’un abandon progressif. L’abandon des quartiers populaires, des campagnes, des classes moyennes étranglées. L’abandon des jeunes, des précaires, des soignants, des profs, des policiers, des migrants, des petits patrons, des retraités. Bref : de toutes celles et ceux qui ne crient pas assez fort pour être entendus, ou qu’on oppose entre eux pour éviter de leur répondre.
Ce n’est pas une question d’idéologie. C’est une question de courage politique. Et ce courage, il a déserté.
À droite, on promet l’ordre, mais on laisse les zones de non-droit s’enraciner.
À gauche, on promet la justice, mais on fuit les réalités concrètes de terrain.
Au centre, on promet la responsabilité, mais on oublie l’humanité.
Et dans ce vide, les extrêmes prospèrent. Ils prospèrent sur les peurs, sur les douleurs, sur le sentiment d’abandon. Ils prospèrent grâce à l’inaction des autres.
Alors oui, Marine Le Pen a été condamnée. Mais ne vous y trompez pas : ce n’est pas une victoire de la morale. Ce n’est pas une victoire de la démocratie. Pas tant que cette démocratie continue de laisser croire qu’elle ne sert qu’une partie de la population au détriment de l’autre. Pas tant que voter signifie devoir dire oui à des mesures qu’on rejette, et non à des propositions qu’on estime utiles. Pas tant que le vote est un renoncement à moitié, et une colère à moitié aussi.
Moi, je rêve d’une politique qui ne choisit pas son peuple. Qui ne gouverne pas contre une partie de la France pour plaire à une autre. Une politique qui refuse de voir des citoyens comme des chiffres ou des problèmes, mais qui les considère tous comme des voix, des vies, des réalités à prendre en compte.
Ce n’est pas à nous de trouver les solutions. On a déjà fait notre part : on a voté, parfois avec espoir, parfois à contrecœur. On a cru, on a attendu. Maintenant, à vous de faire la vôtre. À vous de voir ce qu’il y a devant vos yeux. À vous d’agir. Tous, ensemble. Pas contre les uns pour les autres. Mais pour tous.
Je n’ai que 19 ans. Et pourtant, j’ai l’impression d’avoir déjà trop vu. Mais je garde l’espoir, infime, qu’un jour, quelqu’un là-haut comprendra qu’on peut faire de la politique autrement. Pas en criant plus fort que les autres. Mais en écoutant mieux. En servant mieux.
Pas en gagnant contre l’autre.
Mais en construisant avec tous.
Un jeune français de 19 ans.